SOMMAIRE

Aux origines des premiers peuplements
L'Antiquité
L'Islam
L'évolution urbaine
Histoire de la Municipalité du Kef
Histoire de la communauté juive du Kef
Conquête du Kef en 1881

 

EL-KEF
Texte: Mohamed Tlili
HISTOIRE

Aux origines des premiers peuplements

Sur les débuts de l’histoire de la ville du Kef, on connaît très peu de choses en vérité. Seuls quelques indices archéologiques, remontant toutefois aux plus anciennes époques préhistoriques, semblent offrir certaines informations fort précieuses sur l’environnement et le contexte de la très haute antiquité de la naissance de la ville ou du moins sur l’ancienneté de son peuplement humain.

Le site du Kef fait partie de l’ensemble écologique du bassin versant de la vallée de l'oued Mellègue, véritable berceau d’une riche culture préhistorique paléolithique révélée par de nombreux et remarquables gisements tels que ceux d’Al ‘Aouinet, de oued Sarrat, de Sidi Zin et de Kum el Mejin. La présence précoce du peuplement humain est attestée au pied même de la ville, à l’endroit dit Sidi ez-Zine, célèbre par ses industries acheuléennes. De nombreuses autres traces des périodes épipaléolithiques et néolithiques, en particulier les escargotières, confirment la densité et la permanence de cette occupation humaine dans le voisinage immédiat de la ville.

Une corrélation étroite semble s’établir entre des révolutions écologiques et une certaine forme de culture et d’établissements humains, relatives tout à la fois au climat, au couvert végétal et à la richesse hydrologique. L’environnement du site du Kef a dû connaître successivement les grandes retenues d’eau, la formation des cours d’eau et l’émergence du rôle prépondérant des sources. A ces trois stades devaient correspondre l’acheuléen, le moustérien et le néolithique.

          Présence et révélation du sacré

Perché sur le dernier promontoire de la montagne sacrée de jbel ed-Dir, connu aussi sous le nom d’Azrou, le site du Kef, très riche en eau, est marqué, très tôt, par la révélation du sacré. Déjà le culte primitif du génie de la grande source de Ras el’Aïn, plus connu de nos jours sous le couvert de Lalla Mna (Ninna Thala), ainsi que les découvertes récentes, sur la rive droite de oued el Aïn, d’outillage lithique néolithique, devaient refléter un attachement précoce au sol lié certainement à l’exploitation agricole. D’autres manifestations, telles que les peintures pariétales néolithiques des abris sous roche en face de la source lustrale de Sidi Mansour et des falaises de Chgaga, expriment encore mieux cet attachement  et la vocation magico-religieuse de ces premiers sanctuaires naturels, particulièrement ceux de la grotte matrice de la grande source de Ras el Aïn et de la femme fissure et ouverte de Chgaga.

Grottes de Sidi Mansour

De multiples indices, dont les peintures pariétales mentionnées, attestent de la haute valeur hiérophanique des lieux et celle d’un centre de pèlerinage primitif autour des génies kratophaniques et lustraux particulièrement ceux du rocher et des grandes sources de Ras el Aïn et de Sidi Mansour Al Gayess. Celles-ci avaient dû favoriser, très tôt, l’éclosion et la multiplicité des expressions des cultes et des rites de la fécondité sur l’ensemble du plateau du Dyr, dont l’ancien nom Azrou, comme dyr, exprime le sens du sanctuaire et de montagne sacrée. Cultes exprimés par les rites de magie sympathique, toujours vivaces, étroitement associés aux cultes agraires, dont on relève de nombreuses manifestations dans la vénération du rocher (lalla chgaga) des sources (lalla mna) des arbres (lalla chajra) des cuvettes-impluvium (lalla gassa') et des animaux, particulièrement le lion (sidi essid). Autant de sanctuaires primitifs qui justifient largement la vocation hiérophanique du synclinal perché du Dyr.

Cette remarquable profusion du sacré sur ces hauteurs devait être vraisemblablement à l’origine du premier nom théophore de Cirta que la ville devait porter à l’aube des temps historiques.

       Genèse et émergence de la cité

Plusieurs vestiges mégalithiques répartis sur tout le plateau calcaire du Dyr, particulièrement dans l’enceinte sacrée de Hram Sidi Mansour témoignent à la fois de l’extension des cultures sèches, de la densité d’occupation des hauteurs du site et de la vitalité du premier semis urbain. D’origine libyque, le premier bourg agricole fortifié devait remonter assez loin dans l’ère protohistorique, probablement du temps de la concentration des activités agro-pastorales et de la formation des premières confédérations tribales autour de divinités poliades fédératrices sous forme d’amphictyonie.

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Dolmen sur les hauteurs du Kef

La concentration des sépultures mégalithiques, le culte des ancêtres et les rassemblements saisonniers offraient le cadre fédérateur à ces premiers noyaux urbains qui devaient, tout en se dégageant de l’emprise rurale, évoluer au contact des civilisations urbaines méditerranéennes archaïques, en particulier avec les Phéniciens, vers de véritables centres urbains. Les plus anciennes manifestations archéologiques de la haute naissance de la ville devaient atteindre très probablement le Vsiècle av. J.-C.. Outre la présence nombreuse de dolmens, le sanctuaire pariétale de Borj Guelal (Qasbah) a livré des tessons de poterie punique du IVe siècle av. J.-C., attestant déjà de la mise en contact et des échanges féconds entre la côte méditerranéenne et l’intérieur du pays numide.

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Vestiges mégalithiques sur le Dyr

C’est l’époque aussi où Carthage s’est constitué son propre territoire africain et étendu loin ses influences culturelles et religieuses, non sans avoir porté la guerre chez les Numides, ses voisins occidentaux.
 

Gisement préhistorique de Sidi Zin

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Sidi Zine: ossement d'une faune Tchado-Zambézienne

 

 

 

 

 

 

Sidi Zine: Industrie acheuléenne

Hachereau

 

 

 

 

 

 

Sidi Zine: Bifaces

 

 

 

 

 

 

Sidi Zine: Industrie Mousterienne

 

 

 

Abris sous roche de Sidi Mansour el-Geyes

Rocher sacré de Chgega: premier sanctuaire rupestre

Oued el-Aïn

Enceinte mégalithique proche du Kef

 

Bas relief découvert au Kef  représentant une scène de sacrifice